vendredi 19 juillet 2013

Séminaire St-Michel....


      Institution d'enseignement privée dirigée par des ecclésiastiques et des laïcs, orientée vers  l'instruction classique et la pratique de la religion, le Séminaire St-Michel a transformés la vie de plusieurs d'entre nous, à Rouyn-Noranda et dans la région, en Abitibi-Témiscamingue. Installé dans les murs de l'ancien orphelinat de Rouyn, le séminaire St-Michel se présente à cette époque sous plusieurs facettes. 
Tout le tra la la s'y trouve : Des salles de cours, une grande salle d'étude, une chapelle, une cafétéria, un dortoir - pour les élèves qui demeurent à l'extérieur de Rouyn -, une radio communautaire, un gymnase, c'est à dire une salle multidisciplinaire qui peut recevoir des spectacles, ou l'on peut jouer comédies et dramatiques, enfin une salle où tous les sports intérieurs peuvent être pratiqués. Tout ceci complété par un terrain de baseball que l'on transforme en patinoire l'hiver venu. 
        
Ce fut mon univers pendant deux belles années. Je ne savais pas encore que nous allions faire partie d'une des dernières cohortes produites par cette vénérable institution qu'était le Séminaire. J'ai appris le Latin, pour être plus précis j'ai essayé de l'apprendre. J'arrête ici l'espace d'un instant pour expliquer cet état de fait : Le professeur, monsieur Mathieu est Haïtien d'origine et moi, je suis québécois français, ça explique tout... Ça n'explique pas tout? Mais si, je précise : Généralement, quand on s'adresse en français à un haïtien, il répond en français mais sans prononcer la lettre "R" dans son discours. Est-ce une tendance généralisée? je ne saurais l'affirmer. Alors, on imagine la scène, cocasse, d'un professeur de Latin ne prononçant pas ses "R". 


"Alo, je disais ceci avant la denièe et ènième intè_uption de monsieur Beaulieu :

-  Une ose se dit osa, des oses, osae (pononcer osa-é). La teminaison ... Mais en latin, les noms (ponoms, adjectifs) changent aussi. Leu teminaison selon leu fonction dans la phase."

Traduit en français, ça donne ceci :
 

-  Une rose se dit rosa. des roses, rosae (prononcez rosa-é). La terminaison ... Mais en latin, les noms (pronoms, adjectifs) changent aussi. leur terminaison selon leur fonction dans la phrase

Comprend-on à présent le sérieux de cette affirmation qui est mienne? L'affirmation selon laquelle il y a faute, non pas de la part de l'élève mais bien  de la part de l'enseignant! Né au Québec, monsieur Mathieu n'aurait pas à nous faire vivre pareille cacophonie. C'est comme chercher une toilette dans un labyrinthe! Je passe et repasse mes yeux sur le texte qui est devant moi et j'ose à peine croire que ce qu'il, monsieur Mathieu, vient de dire n'a aucun sens mais vraiment aucun sens. Et quand je relis le texte qu'il vient lui-même de terminer, la compréhension fini enfin par jaillir, une rrrrroooose. Une rrrrroooose! Je pensais qu'il disait : une "hose", un boyau de jardin en anglais. Passons. J'exagère, comme d'habitude. Finalement, je me suis tout simplement désintéressé du cours de latin. 

Au lieu de passer mon temps à écouter les divagations de monsieur le professeur, je confesse avoir pris beaucoup de temps à épier une bien jolie demoiselle venue à la fenêtre de son logement, de l'autre côté de la rue, un certain matin d'école... C'était en septembre. Depuis, elle réapparaît à sa fenêtre tous les jours, parfois elle se laisse caresser le visage par une douce brise ou encore elle tend le cou vers les chauds rayons du soleil, tandis que moi je rêve de lui coller une bise sur les lèvres. 

Puis, un jour d'hiver peu après les fêtes de Noël et du jour de l'An, de retour au Séminaire, j'ai longtemps remarqué son absence. Ma première blonde, virtuellement parlant. De longs cheveux blond lisses, qui tirent sur le blanc; un teint pâle, joues et lèvres roses. Mince. Belle. Énigmatique locataire d'en face, comme j'ai voulu rassembler suffisamment de courage pour me rendre à ta porte et te dire bonjour, comme ça, juste pour le plaisir de te voir un peu plus près, entendre ta voix et sentir ton odeur. Cette année-là, j'ai coulé le cours de latin, bien entendu. Mais j'ai excellé dans la langue de Molière et celle de Shakespeare, je suis devenu commentateur sportif à la radio du Séminaire, le temps d'un tournoi de Hockey. J'ai dû réécrire la phrase "Je ne dérangerai plus en classe et je n'oublierai plus mes devoirs à la maison" cinq cent fois, dans la salle d'études, un samedi. Je suivais des cours de flûtes à bec, sans succès. Même chose pour la guitare et l'harmonica. Puis je me suis retiré à la bibliothèque et comme un rat j'ai parcouru toutes ses étagères, jusqu'au moindre recoin. J'ai commencé par éplucher les Atlas, car savoir où l'on se trouve est important. Puis je me suis penché sur la nature, la flore, la faune terrestre et aviaire, et même marine car savoir se distinguer des autres est également important. Chaque midi, je trouvais le temps et un endroit où lire. Dans cette bulle, j'oubliais tout de l'extérieur, je poursuivais ma quête du savoir. On m'aurait torturé et jamais je n'aurais avoué l'immense curiosité qui m'habitait en ces temps lointains. Je ne voulais pas qu'on me méprenne pour quelqu'un que je n'étais pas mais je tenais à conserver des liens d'amitié avec mes pairs, ne serait-ce que pour bien paraître en société. Ma soif de connaissances fit de moi un prisonnier du papier. En Égypte, un scribe. En Grèce, un moine. En prison, un écrivain. Au silence, voué au silence. Homme avec peu de vie recherche la lueur d'une chandelle afin de poursuivre le travail de l'écriture... Enfin, l'Histoire est venue s'ajouter à la longue liste des curiosités. À cette seule fin de me renseigner plus avant sur le sujet, j'ai acheté l'encyclopédie de l'Histoire de Simon & Shuster, historiens américains de renommée mondiale et ce, pour la modeste somme de dix dollars canadiens. Le montant à lui seul contribuait à défrayer le coût du dédouanement à la frontière canado-américaine.


Entre seize heures et dix-sept heures. C'est à ce moment que l'on peut pratiquer nos sports préférés; soit au gymnase, soit à l'extérieur. La dernière heure de la journée, de dix-sept heures à 18 heures, c'est à la salle d'études que se termine le quotidien académique. Ainsi, les devoirs accomplis, de retour à la maison, on est libre de faire ce que l'on veut de notre soirée. Ah, la belle vie d'étudiant! En terme de sport individuel, je préférais la gymnastique, surtout le cheval allemand.






En groupe, j'aimais beaucoup le Basket (Ballon panier). À un mètre quatre vingt, j'étais à mon avantage dans ce sport. Ensuite,venait le Volley Ball (Ballon Volant) et en tout dernier le Base-Ball. L'hiver, il y avait la pitoune, le hockey bottine, quoi! Et il y avait les arts, de la flûte à bec à la guitare, du théâtre, des expositions et même une cérémonie religieuse, qui avait lieu si je me souviens bien, tous les mercredis, à la fin des cours. 

C'était à la fin de l'époque des messes dites «À GoGo», une célébration liturgique tenue dans les années soixante au sein de l'Église catholique pour rendre la cérémonie plus aguichante, en présence de musiciens, généralement un ensemble de guitare et de batterie à percussion. Il y a même eu les chants de John  Littelton, un artiste qui mettait de l'avant un genre inspiré du  spiritual afro-américain. Dans les faits, cette messe au final fut proscrite dans nos églises par la hiérarchie épiscopale... 

Puis, la messe chantée en français a rempli les murs du Séminaire, des chants vivants, rythmés, exultants. Dans cette lithurgie, le chant des fidèles est privilégié et c'est pourquoi, durant cette partie de mon adolescence, j'aime être en chapelle. Nos voix, pour la plupart jeunes, fusaient hors des murs, j'en suis sûr. 



Note : les manteaux du surplus d'armée, le lac rémigny, chez les scouts à Mattawa, le lac Normand. le centre de recrutement, par l'oreille. Maurice le chat, le collet à lièvre


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